Les Yoga-Sutra de Patanjali à la lumière des premiers commentaires indiens (Vyasa, Bhoja, Vacaspati Misra) – Erik Sablé, 2008, Dervy-Livres.
La forme de yoga connue aujourd’hui en Occident fut pour la première fois exposée dans les Yoga-Sutras de Patanjali qui, en 195 aphorismes, codifient l’enseignement de cette pratique traditionnelle plusieurs fois millénaires.
En Inde, ils sont indissociables de leurs premiers commentaires et notamment de ceux de Vyasa, Bhoja et Vacaspati Misra. Ces commentaires, toujours lumineux, éclairent beaucoup d’aspects obscurs des Yoga-Sutras dont le système est dualiste. Patanjali décrit en effet une voie de libération qui implique une rupture fondamentale entre l’âme individuelle et le monde de la matière.
A partir de la méthode de la concentration mentale – l’attention se retire graduellement du monde matériel vers une conscience permanente et non-illusoire – Patanjali nous donne un moyen simple, concret pour devenir plus conscient, plus vigilant, plus apte à vivre chaque instant dans sa plénitude.
Les Yoga-Sutras s’enracinent dans la tradition indienne, dans sa philosophie, sa cosmologie, ses mythes, sa conception magique de l’existence très loin de notre univers culturel.
Erik Sablé a voulu exposer ces commentaires, inédits en français pour certains, le plus clairement et le plus fidèlement possible pour que l’immense richesse de ce texte soit utilisable au quotidien, dans notre vie physique et psychique, personnelle et relationnelle, et constitue une ouverture privilégiée à la vie spirituelle.
Les yogis respectent l’ordre de l’univers, basé sur une vision du monde différente de celle proposée par la science objective. Cette vision considère le monde comme un rêve ou une illusion. Des expériences contemporaines en psychologie et en physique quantique correspondent à ces idées indiennes anciennes sur l’influence de l’observateur sur l’objet observé. Erik Sablé aborde la notion d’objectivité, remise en question par des scientifiques ouverts d’esprit. Il explique que certaines ethnologues soutiennent que le monde est une création de la pensée collective à laquelle on appartient, citant l’exemple des Indiens Jivaros. Les Indiens Jivaros ont une vision du monde différente de la nôtre, ce qui n’implique pas que l’une soit correcte et l’autre incorrecte. Les scientifiques admettent de plus en plus que notre vision du monde est influencée par notre collectivité.
En fin de compte, le yogi, dont la quête est accomplie, est dit « être solitaire », il est dans l’isolement. La solitude est souffrance, et la solitude est plénitude. La solitude du yogi est celle de l’être qui est complètement libre de tous les conditionnements et surtout, il est libre du regard de l’autre. Nous sommes souvent dépendants du regard des autres, car notre fonctionnement repose sur la dualité et la confrontation avec autrui. Le yogi, en revanche, est unifié avec le monde, se fondant dans une solitude divine. Les maîtres zen comparaient cela à des tigres qui, à leur époque, n’avaient pas de prédateurs et évoluaient librement dans la jungle, sans crainte ni peur. Ainsi, le yogi libéré, qui expérimente l’état de « Kaivalya » (cette solitude en plénitude), se trouve dans un état parfait de l’absence de peur.